[Geddon-Abadis] Terres Gelées

"Il faut qu'on sorte d'ici." Soupire Valeos en se relevant.

Mehel le regarde faire, sans un mot, mais ne l'imite pas tout de suite. Il s'adresse d'abord à Gabriel, qui est en train de vérifier son matériel et de le remettre en ordre:

"Le bois, vous l'avez trouvé dehors, pas vrai?"

Le technoprêtre hoche affirmativement la tête.

"Montrez-nous le chemin."

Gabriel charge ses sacoches et se met en route. Mehel lui emboîte le pas. De son côté, Valeos tend une main à la soy-ciel afin de la relever.

"Lywenn...Il faut y aller..."

Au fond, il souffre au moins autant qu'elle. Il a dirigé les opérations jusque là et se sent responsable. S'il avait été en mesure de contrôler Mehel, de prévoir les actes de Lywenn, de prendre une décision au moment le plus crucial, ils n'en seraient sans doute pas là. Mais que faire? Baisser les bras et attendre? Attendre quoi, et pourquoi?
Dans son autre main, il tient toujours la sphère. Ils ont ce qu'ils étaient venus prendre, ce qui pourrait sauver leur galaxie ...Il leur faut continuer!

"Lywenn...C'est quand l'Espoir est vraiment mort qu'arrive la Fin. Et le votre est toujours en vie, n'est-ce pas?"

Valeos avait raison. Je l'avais pensé et dit. Tant qu'il y a de l'espoir, rien n'est fini. Il ne fallait pas que je garde en tête les mots de Mehel, cette menace qui pesait sur moi. Un Soy-ciel n'abandonne jamais ce qu'il a commencé et je n'allais pas déshonorer mon peuple par peur d'une mort qui arrivera à un moment ou à un autre.

Je relevais très légèrement la tête, et essuyais mes larmes, le cœur lourd tout de même. Je dégageais doucement mes jambes, et fermais correctement mon manteau pour conserver le peu de chaleur que j'avais réussi à récupérer.

Je pris la main de Valeos et me relevais.

- Il l'est.

Certes, il n'y avait pas une détermination sans borne dans les mots mais ils étaient vrais.

- Valeos... Je suis désolée. Je n'aurais pas du sauter comme ça. Je suis désolée de vous avoir faire peur. Ce n'était pas mes intentions. Et... Je suis désolée de provoquer des tensions entre vous et Mehel. Je m'en veux beaucoup. S'il faut que je prenne mes distances avec vous pour que tout rentre dans l'ordre alors je le ferais, même si cela me sera difficile, vous êtes des frères et je n'ai pas envie d'être une gêne pour vous deux.

Valeos lui sourit avec douceur.

"Ce n'est rien. Ne vous inquiétez pas au sujet de tout cela, ce n'est pas la première fois que ce genre de chose se produit. Mehel est très impulsif, il ne sait pas tenir sa langue, s'il ne vous avait pas provoquée, vous n'auriez pas sauté. Quant à moi, eh bien, j'aurais aussi pu éviter que cela arrive, si j'avais été un peu plus prévenant...Enfin bref."

Il gratte le sable qui entoure le petit feu et l'en recouvre de façon à l'éteindre.

"Il faudrait bien plus que ceci pour nous séparer, Mehel et moi, alors...Je n'ai pas envie que vous preniez vos distances. Ni maintenant, ni plus tard."

Et en disant cela, il lui prend la main et commence à avancer sur les traces des deux autres.

Aurais-je sauté si Mehel ne m'aurait pas provoqué, quelque chose au fond de moi me disait que oui. Que j'aurais sauter même s'il ne m'avait rien dit. Il avait fallu descendre vite et mis à part mes ailes, il n'y avait pas d'autre solution. La seule différence, si le Nadir ne m'aurait rien dit, était que je n'aurais pas sauté aussi sauvagement, je n'aurais pas fait en sorte que Valeos ne m'arrête pas, j'aurais sauté avec plus de concentration et pas aussi rapidement.
L'appréhension qui m'avait quitté m'avait peut être permise d'y arriver.

Je regardais l'Altalavirien éteindre le feu et lorsqu'il me reprit la main et prononçant ses quelques mots, c'était une étrange sensation qui étreignait mon cœur. Moi qui était assez immergée dans les sentiments, déjà de par cette capacité à arriver à les offrir, il fallait avoué que en ce moment, je ne comprenais pas vraiment ce qu'il se passait. Ni pourquoi les mots qu'il venait de dire avaient fait augmenter le rythme de mon cœur.

Mon regard se tourna vers les débris où se trouvait caché le corps à présent sans vie de la pauvre petite, et je baissais le regard, suivait Valeos en serrant un peu plus sa main. J'espérais qu'il avait raison, que je n'allais pas interférer entre lui et le Nadir, tout en pouvant continuer à rester auprès de lui...
La suite du voyage nous le dira certainement...

Une fois que tout le monde est sorti, Valeos allume la balise qui doit signaler leur position à Anna. L'altalavirien prend bien soin de se placer entre Mehel et Lywenn jusqu'à l'arrivée du vaisseau, espérant apaiser la colère de l'un, et calmer l'inquiétude de l'autre. Lorsque l'engin se pose enfin et qu'Anna en sort, radieuse, le nadris s'empresse de gravir le pont pour se mettre au chaud, suivi de près par Gabriel, qui est chaleureusement accueilli par la pilote, puis suivent Valeos et Lywenn, qui ne se sont toujours pas lâchés.
Anna est catastrophée de constater que la soy-ciel est si peu couverte, et la sépare de son compagnon pour l'entraîner dans leur chambre. Elle commence à fouiller dans son placard immédiatement après être entrée, invitant Lywenn à s'asseoir sur le lit.

"Ma pauvre chérie! Ces mâles stupides qui n'ont même pas cherché à te couvrir un peu mieux!"

Des vêtements atterrissent un peu partout à mesure que le placard se vide, mais Anna en sort quelques-uns avec un peu plus de délicatesse et les pose sur les genoux de sa "colocataire".

"Tu vas aller prendre une bonne douche bien chaude, et tu enfileras ça. Ils sont propres et secs, ça te fera du bien! Pendant ce temps, je vais préparer du café et du chocolat pour réchauffer tout le monde, d'accord?"

Il fallait avouer que de voir le vaisseau se poser était pour la première fois de ma vie une réjouissance que je n'aurais jamais cru imaginer. Mais à peine à l'intérieur, que me voilà séparée de Valeos et entraînée par Anna. Les yeux grands ouvert, je m'asseyais sur le lit regardant les vêtements se disperser rapidement un peu partout, puis ceux qu'elle me posa sur les genoux.

Euh... Merci... D'accord...

En fait, je n'avais pas vraiment le choix et de toute façon le caractère de la jeune femme me forçait à accepter, laissant ma timidité parler à ma place.
J'attendais qu'elle sorte de la pièce et restais encore un instant immobile sur le lit. Je secouais légèrement la tête, posant les vêtements à coté de moi avant d'enlever le manteau. Un frisson me parcouru l'échine et machinalement, j'entrais dans la salle de bain en emportant ce qu'elle m'avait donnée.
Au début, j'avais l'impression que l'eau chaude de la douche me brûlait le corps, le froid avait été tellement intense et au fur et à mesure, je pouvais me détendre un peu et profiter de cette chaleur.
Une fois séchée et les vêtements enfilés, je sortis de la chambre pour rejoindre les autres, bien que j'aurais préférée rester seule dans la chambre.

Quand Lywenn rejoint le cockpit, tous se sont assis sur la banquette, autour de la petite table ronde en bois. Les parfums du café et du chocolat s'entremêlent en sortant par le bec des deux théières qui en ornent le centre. Des petites tasses en porcelaine sont disposées devant chaque passager, plus une pour la soy-ciel, là où il reste une place de libre.
Anna se lève lorsqu'elle entre, glisse ses paumes sur les deux joues de Lywenn et l'observe sous tous les angles.

"Alors, comment te sens-tu? Ca a l'air d'aller un peu mieux...Tu n'as mal nulle part, ça ira?"

Une nouvelle fois, j'ouvrais de gros yeux, le comportement d'Anna me mettait vraiment mal à l'aise, même si cela partait d'une bonne intention.

Euh... Non, non, ça va... Je suis pas en sucre... Je vais bien... C'était juste du froid...

Et ne sachant pas trop comment réagir, je baissais un peu le visage et m'installais directement à la place libre. Prenant la théière avec le chocolat chaud, je remplissais la tasse qui m'était destinée et la reposais doucement. Je ne bus pas tout de suite, et en attendant que le liquide refroidisse un peu, je glissais mes mains entre mes jambes, gardant une nouvelle fois le silence, préférant écouter et tenter de suivre les éventuelles discussions.

Anna reprend sa place en souriant, l'air rassuré, et Mehel, qui était assis sous sa forme de chien en profite pour se coucher contre elle, tout malappris qu'il est. Par chance, elle ne s'en formalise pas, allant même jusqu'à le traiter en chien et lui caresser la tête, ce qui doit le réjouir. Valeos se contient pour ne pas le réprimander, se servant du café, et en proposant à Gabriel, qui accepte d'un mouvement de tête.

"Donc, pour en revenir à ce que je disais, commence Anna en avalant une gorgée de chocolat, avec cette tempête qui approche, nous sommes coincés ici pour la nuit. Il vaut mieux éviter de défier Geddon, tout bon pilote le sait."

En y prêtant attention, Lywenn peut constater qu'il fait très sombre à l'extérieur, en raison de l'épaisseur du brouillard.

"Heureusement que vous avez fait vite un peu plus et j'aurais eu du mal à vous retrouver dans cette purée de pois!"

Le chien pousse un long soupir, comme le ferait celui qui ne va pas tarder à s'endormir, et s'enroule un peu plus sur lui-même.
En face de Lywenn, Valeos a du mal à retrouver tous ses esprits, mais il répond tout de même à la pilote:

"Oui, c'est un coup de chance. Et puis, vous êtes très efficace, ce qui nous a facilité les choses. J'espère que cela ne va être trop risque pour le vaisseau de le laisser immobile dans un froid pareil.
-Aucun risque! Il en a vu d'autres!"

Si elle n'était pas aussi rayonnante, le cockpit se noierait dans une bien triste ambiance...

À l'évocation d'une tempête et donc de rester sur place cette nuit, mon regard se posa sur l'extérieur, voilà qui n'était pas pour me rassurer plus. Surtout lorsque Valeos demandait s'il y avait un risque pour le vaisseau de risquer immobile et voilà que dans mon esprit les catastrophe à cause des défaillances des machines défilaient, et il fallait espérer que la tempête ne s'attarde pas.

Je pris une grande inspiration et posais mes mains sur la tasse. Et j'essayais de me rassurer en me disant qu'il y avait la pilote qui connaissait bien son appareil et un passionné de machines.
Je portais la tasse à mes lèvres, buvant quelques gorgées avant de la reposer, laissant mes mains sur celle-ci.

- C'est certain qu'on pourra repartir demain ? Je veux dire... Même si la tempête ne s'arrête pas ?

Et je m'engueulais intérieurement de ne pas arriver à chasser mes pensées de ma tête.

Anna porte la tasse à ses lèvres, puis la repose sur la table.

"Les capteurs du vaisseau ont pu calculer que la tempête durera jusqu'à deux heures avant le lever du soleil. Je me lèverai à ce moment-là pour déblayer la neige, et on sera parti après le petit-déjeuner!"

Valeos soulève un autre problème:

"En revanche, il faudra se préparer à être dérangés pendant la nuit pas les Bêtes des Tempêtes. Elles sont guidées par les sources de chaleur et risquent d'être attirées par le vaisseau. Enfin...Tant que tout est bien fermé...
-Oh, oui! J'ai l'habitude! Le rassure Anna avec un sourire. Et puis, ce sera jamais pire que les vers des sables de Venori-Dela.
-En effet..."

Valeos a beau converser, il a du mal à se concentrer totalement sur leur échange. Son regard se perd dans le noir de son café, et il repense à tout ce qui s'est déjà passé depuis qu'il a commencé à suivre Lywenn, à leur départ du Birdy Dog. S'il était enthousiaste auparavant, il a à présent des craintes quant à la suite des évènements, et à sa capacité à pouvoir tout gérer. Il est le guide, après tout, il lui faut montrer la voie à suivre à ses compagnons, mais il ne se sent pas l'étoffe d'un chef, ni d'un meneur. Alors, au fond, il essaie de se convaincre qu'il peut l'obtenir, qu'il peut grandir, et avancer.
Gabriel, de son côté, n'est pas particulièrement loquace. Il se comporte comme un simple observateur, détaché de ce qui se déroule sous ses yeux. Peut-être est-il lui aussi assailli par des émotions contradictoires, qui l'empêchent de parler...A moins que cette attitude fasse partie intégrante de son mode de vie.

Par les esprits, ne pouvaient-ils pas arrêter de parler de tous ces monstres ?! Ce n'était pas cette nuit que j'allais dormir... Entre ce qui c'était passé et les choses qui pouvaient envahir le vaisseau.

Un long frisson me parcouru et je bus de nouveau quelques gorgées, prenant soin de poser la tasse pour dissimuler les tremblements du aux frissons que je pouvais avoir.

Mon regard se posa sur Gabriel. Il n'avait pratiquement pas parlé, jusqu'à présent. Peut être ne le voulait-il pas, ou ne l'osait-il pas. Je regardais un instant Valeos, je n'aimais pas vraiment l'air préoccupé qu'il arborait. Enfin mes yeux se posèrent très rapidement sur Mehel pour revenir sur le technoprêtre et je ne pouvais pas cesser de m'en vouloir. De n'avoir rien pu faire pour aider la petite.

- C'était... Une de vos proches ?

Le technoprêtre relève la tête vers Lywenn.

"Non. Je l'ai trouvée là-bas. "

Valeos se redresse un peu, subitement intéressé par la conversation.

"Elle était déjà dans la caverne quand vous êtes arrivé?
-Oui."

Par ce froid! L'altalavirien est perplexe: il ne saisit pas bien comment cela peut être possible, il fixe Gabriel sans dissimuler sa surprise.

"La machine s'est écroulée. Explique ce dernier. Quand j'ai retiré la sphère, tout l'édifice est tombé. J'ai échappé à la mort grâce à l'orbe, mais quand je suis arrivé en bas, j'ai trouvé cette fille sous les débris.
-Qu'est-ce qu'elle pouvait bien faire là? Demande Anna, qui n'a pas perdu une miette de l'échange.
-Elle chantait."

Tout le monde sursaute en constatant que Mehel ne dormait pas. Pourtant, ce dernier ne bouge pas d'un pouce.

"Elle chantait pour maintenir la sphère activée." Ajoute-t-il.

Valeos fronce les sourcils.

"Mais enfin l'orbe devait être là depuis des dizaines d'années, cette fille n'a pas pu...!
-Je donne juste une idée, je n'ai pas dit que c'était la vérité..."

La réponse me fit froncer les sourcils et avec attention j'écoutais les explications de Gabriel, en entendant la voix de Mehel, je sursautais en tournant le visage vers lui pendant quelques secondes avant de perdre mon regard dans le vide.

- Si elle était là, à chanter, c'est qu'il y avait une raison. Peut être que quelqu'un savait qu'elle était là, il l'aidait à survivre pendant tout ce temps pour protéger quelque chose ou la maintenant prisonnière mais dans ce cas là, pourquoi...
Ou alors... Elle était reliée à l'orbe d'une autre façon... Ses pouvoirs peut être, maintenant qu'elle... Maintenant qu'elle n'est plus.

Mon regard se posait sur Valeos qui avait la sphère sur lui, cela ne coûtait rien d'essayer.

Mehel se redresse légèrement, mais reste couché sur la banquette.

"Val, dit-il, on a pu le constater, la sphère est active uniquement quand des vibrations sonores la touchent. Dans ces conditions là, elle amoindri ou annule les effets de l'apesanteur. Tu as vu la machine, elle était en métal, non?"

Valeos acquiesce d'un signe de tête.

"Les vibrations sonores se propagent très bien dans ces matériaux là, prends un diapason, par exemple, et quand Gabriel a retiré la sphère, c'est tout l'édifice qui s'est effondré. En fait, je pense que c'est l'orbe qui le maintenait debout, grâce au son que devait produire la fille d'en bas.
-Jusque là, d'accord, mais comment a-t-elle pu survivre?
-Justement, j'y viens. Comme le dit la soy-ciel, il y avait peut-être quelqu'un qui la maintenait en vie, ou prisonnière dans un espace particulier de la machine, où le froid n'aurait pas pu l'atteindre. Ou bien, plus simplement, elle restait en vie grâce à une assistance artificielle, et se trouvait là depuis que l'édifice a été construit. Après tout, même si elle avait été endormie pendant tout ce temps, son coeur devait toujours battre, et c'était peut-être suffisant pour faire fonctionner l'orbe."

L'altalavirien réfléchit pendant une poignée de secondes. L'explication de Mehel tient la route, mais demande à être vérifiée. Il sort la sphère de sa poche, déboutonne sa chemise et la colle contre sa poitrine.
Immédiatement, l'orbe se remet à briller, au rythme des battements de son coeur, plus fort que lorsque Mehel murmurait près d'elle alors qu'ils descendaient tous deux dans le gouffre. Anna écarquille les yeux.

"Wha! Vous avez vu cet éclat? C'est magnifique!
-Il est différent de la dernière fois. Murmure Valeos en l'observant.
-On dirait que la sphère réagit en fonction du son produit, non?" S'interroge Mehel, qui a fini par s'asseoir.

L'explication de Mehel était cohérente, mais les battements d'un cœur surtout d'une personne endormit étaient bien plus faible que le murmure d'une personne. D'ailleurs Valeos voulait tester, je baissais le visage sur ma tasse alors qu'il posait l'orbe sur lui mais le relevais en voyant la lumière que produisait la sphère.
Et en repensant à l'explication du Nadir je crispais mes mains sur la tasse, manquerait plus qu'il fasse décoller le vaisseau...

- Plus le son est discret, plus l'orbe réagit, apparemment. Mais pourquoi s'être donné tout ce mal pour maintenir l'édifice en place, pourquoi vouloir absolument que l'orbe reste actif ? Il y avait peut être quelque chose d'autre avec la petite, ou peut être cela a un rapport avec les autres sphères, une sorte de communication...

"Non...Ce n'est pas tout à fait ça...Murmure Valeos, qui ne quitte plus la sphère des yeux. J'ai l'impression qu'elle...On dirait qu'elle cherche à établir une résonance parfaite avec mes battements de coeur, comme pour créer une symbiose avec moi.
-Si tu me dis que ce truc est vivant...S'inquiète Mehel, dont les poils du dos se hérissent.
-Je ne sais pas, je pense que cela contient surtout une très grande énergie...Il est effectivement possible qu'on ait voulu la garder active pour qu'elle reste liée à toutes les autres sphères, c'est d'ailleurs l'explication la plus logique, je pense. Mais pourquoi?"

Gêné par les émotions que la sphère semble remuer en lui, Valeos la repose sur ses genoux et reboutonne sa chemise, alors que la lueur s'estompe peu à peu.

"Je me demande s'il y a des êtres avec lesquels elle peut s'accorder parfaitement...
-Vous pensez que les autres orbes ont aussi un pouvoir particulier? Demande Anna, curieuse.
-Aucune idée...Sans doute. Souffle Valeos, qui éprouve soudain un grand vide émotionnel. Je ne suis pas sûr qu'elles aient été créées dans l'unique but de garder les Deonis endormis. Il y a sûrement autre chose.
-Lensis a dit que la stèle où était indiquée la position de cet orbe était gravée en Shamas. En nous renseignant un peu plus sur eux, on trouvera peut-être plein d'informations sur les sphères, non?
-Les Shamas se sont éteints il y a plus de 500 ans. Lui rappelle Anna. Je te souhaite donc bonne chance, ne serait-ce que pour réussir à tout traduire si tu trouves quelque chose..."

J'avais gardée les sourcils légèrement froncés lorsque Valeos expliquait ce qu'il semblait ressentir avec l'orbe. Quand il le reposa, je portais de nouveau la tasse à mes lèvres et en finis le contenu tout en écoutant.

- Lensis, justement, arrive à traduire ce qui est écrit en Shamas, il avait dit qu'il avait mis du temps à l'apprendre.

Je faisais tourner la tasse entre mes doigts et continuais.

- Les orbes ne pourront être actionnées que si elles sont toutes réunies. En étant actives, elles doivent communiquer et offrir une possibilité de retrouver les autres. Pour ce qui est des informations, c'est le mieux à faire, mais par où commencer, la planète d'origine des Shamas ? Il doit bien rester des ruines, ou quelques choses.

"C'est-à-dire que..., Reprend Valeos avec un air désolé, les Shamas étaient très secrets et je ne suis pas sûr que quelqu'un sache à quoi ils ressemblaient, qui ils étaient vraiment, et encore moins où ils vivaient...
-C'est vrai qu'il y a peu d'informations sur eux, complète Anna, on sait juste quand ils ont disparu, qu'on les appelait les Faiseurs de Planètes et qu'on les disait très puissants, mais en dehors de ça..."

Mehel se renfrogne, baissant les oreilles et regardant ailleurs. Apparemment, il n'en sait pas plus.

"Avec la guerre, beaucoup d'Histoire a été perdue, déclare Valeos, et il est difficile de la retrouver sans pouvoir contacter les peuples plus anciens, comme les Veneras. Lensis doit disposer de beaucoup d'informations, mais j'ignore si qui que ce soit d'autre pourrait nous aider..."

- Les Kshalirs avaient trouvés la stèle sur T5, ils sont tombés dessus par hasard ? Il y en a peut être d'autres. Lensis doit bien avoir quelques informations sur tout ça, avec tous les livres qu'il possède... Pour les Veneras, ils sont quasiment impossible à trou... ver...

La pensée qui venait de me traverser l'esprit ne devait certainement pas être du goût de Valeos. Mais je me rappelais des paroles qu'il avait eu lors que notre promenade sur Shaosel. N'avait-il pas dit qu'une personne atteinte du symptôme des Reyos pouvait parfois trouver une personne qui se trouvait sur une planète éloignée de celle où ils se trouvaient ? Encore fallait-il trouver une personne qui puisse faire cela. Et je poussais un soupir.

- Et bien il ne nous reste plus que Lensis et sa grande bibliothèque.

"Attendez voir. Souffle Mehel. Cette histoire de Kshalirs...C'est vrai que c'est plutôt bizarre qu'ils aient trouvé une stèle comme ça, sans raison...Et sur T5 en plus, alors qu'on dit que personne n'en revient vivant! Ca cache peut-être quelque chose."

Comme s'il était las de parler sous sa forme de chien, il se métamorphose rapidement en jeune homme.

"A ce qu'on dit, les Kshalirs sont assez anciens eux aussi. Déclare Anna. Le problème, c'est qu'ils se sont exilés dans une autre galaxie, et contacter leurs sages est vraiment impossible.
-Leurs Sages peut-être, intervient Valeos, mais la reine ne doit pas diriger tous les Kshalirs de Libertae à elle toute seule et sans intermédiaires! Il y a forcément des chefs dans notre galaxie. Sur Klova, peut-être..
-Encore faut-il la trouver, cette planète folle! Peste Mehel.
-C'est sûr..."

Valeos pince les lèvres, il est désappointé. Encore un mystère difficile à résoudre qu'Altalavir confiera à quelqu'un d'autre que lui. De plus, l'idée de retourner chez le "bibliothécaire" de service ne l'enchante pas du tout!

"Alors oui, dit-il, il ne nous reste plus que Lensis..."

Et voilà qu'ils parlaient de trouver des membres d'un autre peuple, mais forcément, encore des personnes très difficiles à trouver.
Voilà que je devais aborder un sujet pas très apprécié. Je levais le regard quelques secondes sur Valeos, avant de revenir sur la tasse que je faisais toujours tourner dans mes mains.

*** - Vous m'aviez parler qu'une personne atteinte du sydrome des Reyos pouvait trouver des personnes très éloignées d'eux... Si nous trouvions une personne atteinte de ce syndrome, alors peut être pourrait-elle nous orienter vers ceux que nous cherchons, sans forcément passer par Lensis... ***

Et je levais de nouveau le regard sur Valeos, observant ses réactions.

Valeos la fixe droit dans les yeux. Son expression est difficile à décrire: il semble partagé entre l'air préoccupé, le regard outré, et l'embarras pur et simple. Ses doigts se serrent autour de sa tasse alors qu'il lui répond avec calme:

"Je dois avouer que c'est une bonne idée, même si elle me déplaît."

Son regard retombe sur sa tasse. Il n'a toujours pas fini son café, et celui-ci doit être froid, aussi ne le boira-t-il sans doute pas.

"Maître Solerian...Devrait être capable de nous aider. Seulement...Le lui demander, c'est...Je ne sais pas trop..."

Autour d'eux, les autres conversent toujours, en échangeant leurs avis sur le peuple kshalir et ses secrets.[i]

Je me mordis la lèvre inférieure, je savais bien que c'était une idée déplaisante et c'était pour cette raison que je ne voulais pas en parler devant tout le monde. Et alors que Valeos baissa son regard sur sa tasse, mentionnant Solerian, il me fallut un long moment avant de comprendre pourquoi il me parlait de lui.

Et lorsque ce fut le cas, faisant le lien avec la maladie que m'avait décrit l'Altalvirien et la mobilité réduite de Solerian, mon regard se fit confus et je baissais le visage. J'aurais du le comprendre avant.

Encore une fois je me mordis la lèvre, tâchant de prendre le dessus sur mon embarras et relevais le regard sur Valeos.

*** Valeos, nous n'avons pas vraiment le choix... Nous allons tourner en rond, perdre un temps précieux. Ce n'est pas pour notre compte personnel, c'est pour trouver les orbes, pour empêcher un nouveau massacre de se dérouler. Je le ferais. Je lui demanderais. Vous n'aurez pas à vous sentir mal ainsi. D'accord ?***

Sans le quitter des yeux, je lui offris un doux sourire, se voulant rassurant. Il m'aurait étonné que Solerian refuse de nous aider, restait à savoir si Valeos acceptait.

Valeos secoue négativement la tête, relevant les yeux vers Lywenn.

"Non, non. Je ne peux accepter...Je le ferai."

Dans ses yeux brille une détermination farouche, celle d'un homme prêt à tout pour aller de l'avant, et sauver son peuple. Pourtant, il ne sourit pas, l'idée lui étant toujours déplaisante. Mehel attire son attention sur ce que dit Anna, d'une petite tape sur l'épaule.

"On va s'y mettre tout de suite. On commence par vérifier que tous les volets de sécurité ferment bien, ensuite on sortira les caisses d'armes. Après ça, Lywenn et moi, on préparera un bon repas pendant que vous irez vous décrasser en bas!"

Les trois hommes acquiescent de concert, puis Gabriel se met debout et commence la vérification des volets, suivi de près par Valeos et Mehel. Anna se dirige vers le poste de pilotage et effectue quelques réglages pendant que la soy-ciel débarrasse la petite table. Quelques minutes plus tard, tous se retrouvent dans le couloir le plus large du vaisseau, où la pilote ouvre des placards d'où elle sort les fameuses caisses d'armes. Chacun choisit la sienne, à l'exception de Lywenn, qui n'est pas enchantée à l'idée d'avoir à se servir de ces choses. Le remarquant, Valeos détache son poignard de sa ceinture et le lui tend.

"Il m'a porté chance plus d'une fois, mais je ne devrais pas en avoir besoin pour le moment...Prenez-le."[i]